Et si la France devenait un peu plus positive ?

 

Le français est un râleur-né ! Cette image semble coller à la culture française et force est de constater que tous les faits tendent à la nourrir. Ce stéréotype, bien connu, fait également partie de la perception que nos voisins outre atlantique se font de nous. Rares sont les décisions nationales qui font l’unanimité en France. Quelle que soit l’initiative économique ou sociale entreprise, elle trouvera toujours ses opposants. Cet état de fait semble conforter cette définition, émise un jour par un ami, qui m’a dit que « la France est un pays où la moitié de la population s’évertue à embêter l’autre moitié ».  Le tout est de savoir dans quelle moitié on se positionne. Ce qui n’est pas évident car bien souvent, il nous arrive de changer de camp pour passer d’une moitié à l’autre.

 

Une France qui traque ses réussites

Depuis, j’avoue que je n’arrête pas de penser à cette définition, à chaque fois que j'essaie d'analyser des faits d’actualité. Bien souvent, l’enchaînement des informations semble conforter cette thèse d’une France qui ne cesse de traquer ses réussites. Tant qu’il ne sortait pas du lot, personne ne pensait de mal à propos de François Fillon, mais dès qu’il a eu le vent en poupe en explosant les scores aux élections primaires de la droite, les foudres se sont abattus sur lui. La suite, on la connaît. François Bayrou va connaître le même sort. Tant qu’il ne pesait pas lourd, il faisait l’objet d’une totale indifférence. Mais dès qu’il a accédé, pour la première fois de sa vie politique, à un poste de ministre qui semble tout de même mérité, il a fait l’objet d’un tel acharnement médiatique qu’il a fini par jeter l’éponge. D’ailleurs, on ne parle plus de lui depuis qu’il est sorti du gouvernement. Preuve en est que « l’opinion publique » a eu gain de cause pour passer à autre chose ou à quelqu’un d’autre. Depuis qu’il est élu, le nouveau gouvernement est traqué par les médias dans ses moindres faits et gestes dans l’espoir de trouver une faille permettant de le faire vaciller. En s’attaquant à Richard Ferrand, l’opinion médiatique est tombée sur un os qu’elle a eu beaucoup de mal à rogner. Fin politicien, le nouveau gouvernement a trouvé la parade pour calmer les ardeurs de la France hargneuse en le mutant de son poste de ministre pour le nommer chef du groupe parlementaire de La République En Marche.

 

A la recherche du scoop négatif

Jamais un gouvernement n’avait fait autant pour faire avancer le dialogue et les réformes en France en si peu de temps et pourtant, ce ne sont pas les fumigènes qui manquent pour chercher à atteindre le nouveau Président Emmanuel Macron, après s’être acharnés sur François Hollande, soit dit en passant.  Seulement là, on a affaire à un professionnel qui applique scrupuleusement au domaine public les bonnes recettes de management éprouvées dans le privé. Il sait que les médias français sont avides de scoop, entendez par là « scoop négatif ». C’est pour cela qu’il leur préfère les médias étrangers et les outils de communication digitale qui n’ont jamais autant pris le pas sur la communication politique en France. Tant que les journalistes français ne font pas preuve d’objectivité et d’attention positive pour soutenir les réformes dont la France a cruellement besoin, ils ne risquent pas de décrocher cette interview tellement convoitée avec le nouveau président.

 

Une pratique ancrée un peu partout

Cette traque du succès en France ne touche pas que le monde politique, loin de là. Elle est partout ! Cyril Hanouna avec son émission « Touche Pas à Mon Poste » en a fait les frais. Même si on n’est pas vraiment fans de l’animateur, on est tout de même frappés par l’acharnement du CSA, via influenceurs médiatiques interposés, à son encontre. Plus son émission rassemblait de français, gagnait en audience et connaissait le succès, plus il était attaqué de toutes parts avec, toujours, cette France divisée entre fans qui le soutiennent et objecteurs qui cherchent à l’anéantir. Dans un autre registre, on a entendu dernièrement la création d’une commission d’enquête à l’encontre d’une usine Lafarge installée en pleine zone de combat au moyen orient. Son crime ? Avoir été épargnée des combats en continuant à produire normalement. La commission s’est mise en tête de traquer l’entreprise, la soupçonnant d’avoir soudoyé l’ennemi pour maintenir son activité. Bien évidemment, le prisme de l’opinion publique va opiner du chef si cette usine a des relations avec les terroristes. Mais, ne devrions-nous pas nous réjouir de savoir qu’une usine française a réussi l’exploit de maintenir son activité économique malgré les combats qui l’entourent ? Il faut croire que non et que l’administration fiscale préfèrerait voir cette usine détruite plutôt que de la laisser gagner de l'argent et contribuer à faire rayonner l’économie Française.

 

Peut-on parler de jalousie ?

Si l’adage « vivons bien, vivons cachés » traduit le comportement recommandé en France, c’est bien parce que les Français savent à quel point on peut se faire lyncher si on a le malheur d’exposer sa réussite ou sa fortune. Il faut croire que cette tradition ne date pas d’hier. Il suffit de se pencher sur « l’affaire Grégory » qui vient d’être déterrée après 30 ans de silence et qui, d’ailleurs, fait les choux gras de la presse en quête de scandales et d’histoires barbares, pour comprendre à quel point le mal est ancré dans l’histoire de la culture populaire française. Quelles sont les origines de ce drame ? On en parle peu, mais il faut savoir que le petit Grégory a été victime d’un règlement de comptes visant à faire payer la réussite sociale de ses parents. Ceux-là même qui avaient « deux voitures », « un canapé en cuir », « un bon travail » et « un enfant rayonnant et plein de vie ». La jalousie serait-elle si ancrée dans la culture française ? On a du mal à le dire car ce mal semble bien plus complexe qu’il n’y paraît. Quand on voit l’engouement dans les réseaux sociaux et la générosité des français pour sauver un SDF de la rue ou venir en aide à une personne en difficulté, on se dit qu’il y a tout de même de grands cœurs dans cette nation. A moins qu’il ne s’agisse que de ceux qui appartiennent à la fameuse moitié positive. Il n’en demeure pas moins que cette culture de traque du succès semble bien réelle en France. Parfois même, on se réjouit de la chute de ceux qu'on a en ligne de mire. Il n'y a qu'à voir l'hilarité que provoque la chute en public de quelqu'un dans la rue ou d'une personnalité publique sur un plateau tv. Dans d'autres cultures, le premier réflexe est de compatir et de voler au secours de la victime.

 

Finalement, le constat est simple ; si on est au plus bas et que l’on demande de l’aide, nul doute que l’on suscitera un grand élan de générosité. Mais si on est au plus haut et qu’on en oublie l’humilité, clé incontournable pour être apprécié en France, il y a de fortes chances que l’on se fasse incendier au moindre faux pas. Comme s'il fallait être plus bas que les autres pour être apprécié par eux. Alors, sans atteindre la culture de l’apparat à l’américaine, qui pourrait être considérée comme de l’arrogance en France, on pourrait tout de même se réjouir du succès de nos pairs. Surtout quand on sait que derrière chaque réussite, il y a des années de travail et souvent de nombreux échecs. Nous devrions même inverser la tendance, ce qui pourrait nous faire un bien fou. Au lieu de traquer le succès, nous devrions plutôt le susciter et l'encourager afin de provoquer une contagion positive et nous élever tous vers le haut plutôt que de nous enfoncer les uns et les autres vers le bas.

 

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Commentaires: 2
  • #1

    Mathieu (dimanche, 09 juillet 2017 08:29)

    Très beau billet Habib.
    On a tendance à oublier la route du succès, semée d'embûches et de douleurs. On jalouse l'arrivée, mais on oublie que beaucoup n'aimeraient pas passer les dures épreuves qui la précède.
    Focalisons-nous sur le travail accompli plutôt que l'arrivée. Apprécions l'effort, la répétition, l'exécution. C'est la seule route vers la réussite de sa propre vie. Et c'est cette route qu'il faut encenser.

  • #2

    Habib (dimanche, 09 juillet 2017 09:37)

    Merci pour ce commentaire, Mathieu. En effet, on oublie souvent que derrière chaque réussite, il y a de longs efforts et parfois même, des échecs.